Radio FM Ahémé : rapprocher les communautés du Sud-Ouest du Bénin

Radio FM Ahémé : rapprocher les communautés du Sud-Ouest du Bénin

Un jour dans mon média est une série de témoignages, qui illustre chaque semaine le quotidien de personnes travaillant dans les médias de l'Afrique, du monde arabe et de l'Asie du Sud-Est, accompagnés par CFI.

Cette semaine, entretien avec Oboubé Blanchard Djossou de la radio FM Ahémé au Bénin.


La radio FM Ahémé est née en 1999, à l'initiative de quatre communes du Sud-Ouest du Bénin : Pomè, Bopa, Houeyogbe et Kpomasse. C'est une radio communautaire qui vise à valoriser des savoirs endogènes et ancestraux, notamment dans le domaine de l'agriculture.
Les émissions favorisent le transfert de connaissances entre les habitants.

Oboubé Blanchard Djossou, spécialiste en développement local, est responsable de l'équipe web de la radio Ahémé. Il a commencé en 2007, en tant que bénévole, après un master en agronomie et un doctorat en production végétale.
La radio a été créée par des promoteurs de la radio communautaire (ARPC).

Promouvoir les cultures locales

La radio Ahémé a été financée avec l'aide de la Coopération suisse, qui a fourni les fonds pour construire les locaux et acheter le matériel. Le média, situé à Possotomè, est financièrement autonome grâce aux subventions des mairies, aux dons, aux émissions facturées et aux recettes publicitaires. Il s'adresse aux agriculteurs, paysans, pêcheurs et artisans : « Ce sont les acteurs locaux, producteurs de richesses dans la zone qui sont notre cible », explique son responsable. La ligne éditoriale est axée sur le développement humain et durable, la bonne gouvernance et la démocratie, la promotion des cultures locales.

Depuis quelques temps, le média traverse des difficultés : « Il nous arrive de couvrir certaines dépenses avec notre propre argent comme des forfaits internet pour animer nos pages sur les réseaux sociaux ou le transport », commente Oboubé Blanchard.
Le mandat du conseil d'administration actuel de la radio a expiré depuis quelques mois et est en attente d'une nouvelle réélection : « Les représentants que nous envoient les mairies ont souvent une couleur politique et les populations ne se sentent pas représentées par ces derniers. Les habitants voudraient choisir eux-mêmes un représentant neutre. Comme cela ne convient pas aux élus, ils bloquent les subventions de la radio », poursuit-il.
Selon une étude de la Coopération suisse, l'audience de la radio en 2011 était de 350 000 auditeurs.


Seho Victor, le rédacteur en chef de radio Ahémé

Toucher les jeunes et la diaspora

Oboubé Blanchard anime plusieurs émissions dédiées à la jeunesse dont celle intitulée : Jeunesse, TIC et développement local. L'équipe comprend 27 personnes (dont 12 employés et 15 bénévoles), réparties entre différents groupes : la commission marketing, l'équipe prospection et programmation, celle de contrôle et l'équipe technique. Trois réunions de rédaction sont organisées dans la semaine, au cours desquelles les sujets traités sont sélectionnés. Le rédacteur en chef chapeaute l'équipe et le directeur administratif, qui représente l'APRC, veille à la bonne marche du média.

La radio a mis en place un dispositif en cas de scoop ou d'information majeure, dans le cas où le rédacteur en chef serait absent : une équipe restreinte de journalistes a le pouvoir de décision sur la publication de l'information. Oboubé Blanchard, aidé de trois personnes, s'occupe des réseaux sociaux et d'un site internet en cours de construction :
« Nous avons une page Facebook et un compte Twitter qui nous sert à promouvoir la localité de Possotomé et à montrer à de futurs investisseurs qu'elle a du potentiel. Nous sommes très réactifs sur Facebook, chacun anime la page en fonction d'un calendrier de rotation.
»
Les émissions les plus convoitées de la radio sont diffusées en live sur Facebook. Les journalistes sont libres de suggérer des thèmes.

Il était primordial pour le média d'être présent sur les réseaux sociaux pour toucher efficacement les jeunes et la diaspora :

« Les 15-25 ans n'écoutent plus la radio. Les pays voisins, le Nigéria et le Togo par exemple, totalisent une forte communauté de Béninois, environ 60 000 personnes. Nous allons sur les réseaux sociaux pour les toucher. »

Même s'il y a une liberté de la presse au Bénin, il arrive que des journalistes reçoivent des menaces, notamment en période électorale : « Les politiciens veulent faire de la récupération et nous proposent parfois des contenus de communication. Les médias de masse peuvent manipuler les citoyens. Donc chaque homme politique veut se doter d'un média ou se servir de ceux existants », précise-t-il.
Selon lui, les Béninois accordent généralement du crédit à leurs médias, avec certaines réserves pour ceux qui sont publics.

Créer du lien au sein de la population

« Le journaliste doit donc donner le bon exemple en mettant en application les pratiques dont il fait la promotion dans ses interventions ».Pour Oboubé Blanchard, le journalisme est vu comme un métier noble au Bénin et ceux qui le pratiquent sont relativement respectés. Le journaliste joue le rôle d'un éducateur au sein de la communauté.
Ceux de la radio ont suivi plusieurs ateliers de formation par l'intermédiaire d'ONG et de structures de coopération comme CFI pour se perfectionner à la pratique du journalisme et à la déontologie : « Participer au projet Médias 360 nous a remotivés, car nous avons réalisé qu'on pouvait réfléchir à de nouvelles stratégies économiques, administratives et éditoriales pour redresser le fonctionnement de la radio », explique-t-il.

Avant de commencer les activités du média, les premiers employés et bénévoles avaient suivi un stage d'immersion de deux mois à Radio Iléma, une radio située dans une autre localité, pour apprendre les bases du métier. Les nouveaux arrivants sont maintenant formés par les plus anciens. Quant au matériel de travail, les journalistes/animateurs de la radio utilisent principalement des dictaphones, des ordinateurs et des logiciels de montage.
En ce que concerne le volet technique, le siège abrite un studio principal, une salle d'enregistrement-montage et une salle régie pour monitorer toutes les émissions.

Sur le long terme, Oboubé Blanchard et ses collègues comptent réformer le modèle de fonctionnement du média, devenu obsolète à leurs yeux :
« L'association qui pilote la radio ne permet que des adhésions par groupes ou structures. Cela doit changer, nous devons accepter les adhésions individuelles qui vont fluidifier l'organisation
générale ».
La radio a aussi pour ambition de se lancer prochainement dans la monétisation de ses contenus en ligne.


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