Une "saga de sensibilisation" incarnée par la jeunesse yéménite pour prévenir la transmission du coronavirus
Projet associé
YMER+La plateforme Sawtinsaan (voix humaine) vise à diffuser des informations humanitaires fiables et utiles pour les Yéménites ainsi que des histoires touchantes afin de les aider et de trouver des solutions.
par Taïz - Par Muhammad Ali Mahrous
"Une action formidable qui nous donne de l'espoir et nous encourage à croire que notre pays peut être épargné par la pandémie de la Covi-19" : voici comment Radwan Al-Shawafi, 50 ans, décrit ce qu'il considère comme un mouvement de jeunesse passionnant, qui s'est fixé pour mission de bloquer le coronavirus avant même qu'il n'atteigne le Yémen.
"Au début, je portais un regard ironique sur la question, mais face à la ténacité de ces jeunes et à leur investissement dans la campagne préventive, Je m'efforce de porter autant que possible un masque.j'ai fini par croire à ce qu'ils disaient et à faire confiance à leurs actions, car ils œuvraient pour leur communauté, ajoute Radwan avec un sourire admiratif.
À propos de l'impact des campagnes de sensibilisation visant à prévenir la propagation du coronavirus, Radwan explique : "Je m'efforce de porter autant que possible un masque et des gants médicaux. J'évite également les poignées de main et les embrassades, et j'encourage les autres à en faire autant. Et si j'en suis là aujourd'hui, c'est grâce aux efforts de sensibilisation préventive." Alors qu'il tente d'appliquer ces mesures dans la rue, Radwan va être la cible de nombreux commentaires. Des réactions dues, selon lui, au dédain et à une certaine inconscience de la population face à la situation, beaucoup tombant dans l'ironie sans tirer les leçons de l'expérience d'autres pays dotés de solides systèmes de santé et qui ont réussi à limiter la propagation du virus grâce à des mesures préventives.
Une sensibilisation précoce
À travers différentes missions, de nombreux jeunes yéménites ont affiché leur volonté de s'attaquer à la Covid-19. Ils ont imaginé des actions bénévoles de sensibilisation par leurs propres moyens et en ont retenu certaines répondant à un objectif plus ciblé. Ils ont alors redoublé d'efforts afin d'étendre leur impact, tout en restant concentrés sur leur objectif.
La campagne de sensibilisation au coronavirus des jeunes de la ville d'Aden a été la première menée à l'échelle d'un gouvernorat, voire à l'échelle nationale, puisqu'elle a été lancée début janvier, dès que l'épidémie s'est transformée en pandémie en franchissant les frontières de son pays d'origine, la Chine. Au départ, nous étions huit.
Azzam Al-Najjar, fondateur de la campagne, revient sur les débuts de cette initiative : "Au départ, nous étions huit. À chaque réunion, nous échangions nos idées. Le projet a ensuite évolué en une campagne pour les jeunes en ligne, et nous avons élargi notre champ d'action. Nous avons eu un réel impact, et nous en sommes très heureux. […] Nous avons rencontré de nombreux obstacles au début, mais nous avons été guidés par un réel engagement pour notre pays et une responsabilité vis-à-vis de notre société. Cela nous a permis de surmonter une bonne partie des difficultés, et notre groupe s'est agrandi pour accueillir aujourd'hui plus de 40 membres, sans compter les bénévoles réservistes prêts à intervenir si nécessaire."
À Taïz, Khaled Al-Saeed, un jeune militant, a utilisé sa page Facebook pour publier un lien invitant les volontaires à rejoindre la campagne afin de coordonner les actions. En trois jours, il a reçu près de 350 demandes. Dans la même période, Maha Aoun, une militante associative, a reçu plus de 800 demandes dans le cadre de la campagne de Taïz contre le coronavirus, après avoir publié un lien destiné aux personnes qui souhaitaient s'engager bénévolement dans la lutte contre la Covid-19 et dans la sensibilisation de la population à la pandémie. Une réaction qui semble motivée par une réelle volonté d'agir pour protéger la société, comme l'a constaté Maha à la lecture des formulaires qu'elle a reçus durant la campagne Ensemble contre la pandémie de coronavirus.
Sanaa, Hadramaout et d'autres gouvernorats ont vécu la même expérience ces quatre derniers jours, avec des actions de sensibilisation visant à mobiliser la société contre le coronavirus à l'aide des moyens de prévention recommandés par l'Organisation mondiale de la santé. Ces réactions témoignent de la détermination des Yéménites à affronter les vecteurs de mort, quels qu'ils soient.
Des campagnes digitales
Face aux risques que comporte le coronavirus par rapport aux épidémies qui ont frappé le Yémen ces dernières années et qui ont fait l'objet de campagnes de terrain, fructueuses pour la plupart, la mobilisation ne doit pas nécessairement se faire sur le terrain.
L'évolution de la pandémie en a incité beaucoup à se tourner vers les platesformes numériques et les médias sociaux pour s'informer sur le virus, les moyens de prévention et les symptômes, ou encore pour savoir comment renforcer son système immunitaire. Selon le chercheur et ingénieur Fahmy, les campagnes digitales sont "très importantes et peuvent être placées au même niveau que les campagnes de terrain, car il n'y a pas de préférence entre le terrain et le cyberespace au Yémen, un pays où seulement 25% de la population utilise les réseaux sociaux".
Le chercheur, qui dirige une campagne digitale intitulée Coronavirus - Campagne de sensibilisation, s'explique : "Nous devons tirer parti de tous les moyens dont nous disposons pour empêcher que la Covid-19 ne fasse de victimes, alors que nous n'avons pas d'armes sur le plan sanitaire pour faire face aux urgences. Et c'est ce qui nous motive le plus à explorer les différentes possibilités de sensibilisation collective au virus."
Pages et groupes Facebook sont venus compléter ces campagnes de sensibilisation sous diverses appellations :
Les Yéménites contre le coronavirus, Taïz contre le coronavirus, La campagne des jeunes contre le coronavirus, Campagne de sensibilisation au coronavirus, Campagne de sensibilisation au coronavirus des jeunes d'Aden ou encore Hadramaout contre le coronavirus.
En parallèle, un groupe a lancé des hashtags de sensibilisation, tels que
#StopAlaBêtise, #EnsembleFaceALaPandémieDeCoronavirus, #SensibilisationContreLeCoronavirus, #SensibiliserPourVivre et #VousEtesResponsables, #PrévenirLeCoronavirusVautMieuxQueGuérir ou encore#RestezChezVous, #HadramaoutContreLeCovid-19 et enfin #MonComportementSauveDesVies, traduits pour certains dans de nombreux dialectes yéménites.
Des initiatives ont également donné lieu à la formation de plusieurs groupes sur WhatsApp, certains dédiés à la coordination des actions, d'autres à des actions de sensibilisation spécifiques ciblant la population d'un quartier ou d'une zone résidentielle.
Les supports pédagogiques publiés sur les réseaux sociaux comprenaient des visuels et du contenu audio, tels que des flashs infos, des enregistrements audio, des visuels et des brochures de sensibilisation, consacrés pour la plupart aux symptômes du virus et aux moyens de se protéger, notamment en appliquant les mesures barrières préconisées.
Les abonnés des pages de contenus éducatifs ont apprécié avoir ainsi à portée de clic un résumé des informations qu'ils cherchaient. Dans un commentaire en réponse à une publication de la page de sensibilisation à la Covid-19 de Wa'hi, Abdo, l'un des abonnés de la page, écrit : "Merci à Wa'hi pour ces recommandations. Nous espérons que vous continuerez à servir la communauté et à la sensibiliser aux questions sanitaires."
Ce commentaire reflète la gratitude de ces abonnés envers les campagnes menées pour sensibiliser la population.
Des messages d'espoir
Azam Al Najjar, le fondateur de la campagne des jeunes d'Aden, garde espoir : "Cette initiative jeunes est différente : elle veut donner une image positive de la jeunesse yéménite. Je lui souhaite beaucoup de succès, et j'espère que J'espère que Dieu protégera le Yémen de tout mal...Dieu protégera le Yémen de tout mal et que les parties en conflit assumeront leurs responsabilités et mesureront l'ampleur du désastre sanitaire si des cas d'infection étaient diagnostiqués."
Il ajoute, avec une certaine tristesse teintée d'espoir : "Je les invite à baisser les armes et à s'attacher à créer un climat propice pour faire front face à la pandémie et la stopper. Le temps n'est pas à la guerre, mais à la mobilisation contre le Covid-19. Elles doivent écouter ce que la jeunesse propose."
Un espoir partagé par les jeunes Yéménites, qui ont rapidement pris l'initiative de relayer ces actions de sensibilisation préventive, incarnant par là même la cohésion nationale et la grandeur du peuple yéménite, qui a survécu à un terrible destin et aux affres de la guerre qui déchire encore le pays.
Cliquez sur les liens ci-dessous pour accéder aux pages des campagnes de sensibilisation sur Facebook :