Évaluation du projet 4M Asie
Projet associé
4M AsieEn 2014, CFI a lancé le projet 4M Asie pour renforcer les médias locaux, communautaires et nationaux, grâce aux possibilités du numérique. Après sa clôture, en avril 2018, CFI a fait réaliser son évaluation finale par un cabinet externe. Synthèse des résultats.
Le programme d'appui au pluralisme des médias
4M Asie a contribué à atteindre l'objectif général qu'il s'est fixé "d'assurer un pluralisme nécessaire au débat et à la cohésion nationale et régionale dans les pays de l'ASEAN par la prise en compte des questions locales et communautaires et grâce au développement des activités et des outils journalistiques des médias en ligne".
Le projet a su capturer l'évolution des médias, caractérisée par la fin d'une ère réservée aux médias traditionnels ou gouvernementaux et l'émancipation d'une voix plurielle et largement citoyenne, soutenue par la révolution des outils numériques et notamment des réseaux sociaux.
Ce revirement a entamé le retour de préoccupations locales sur la scène médiatique tout en promouvant un modèle de société plus inclusif et redevable vis-à-vis du public. 4M Asie a ainsi intégré des médias jugés à plusieurs égards comme marginaux, de par leur éloignement des capitales, leurs ressources financières limitées, les supports utilisés (blogs, radio, etc.) et enfin leur attention particulière aux questions communautaires.
Le projet visait 4 résultats :
- La création de réseaux, échanges de pratiques et expériences numériques au sein de la communauté régionale des médias ASEAN.
- Lavalorisation des enjeux communautaires et de l'information hyper locale au niveau national, grâce à la création par l'Alliance des Journalistes Indépendants (AJI) d'Indonésie d'un site agrégateur.
- L'augmentation de la présence des enjeux communautaires et des minorités dans les médias au niveau local et national grâce aux possibilités offertes par le numérique.
- Le développement de nouvelles aptitudes, par les acteurs des médias, dans l'utilisation des outils numériques du data journalisme et de la data visualisation, afin de proposer des nouvelles formes journalistiques permettant une plus large expression de la diversité des opinions au sein de la société.
L'évaluation finale de
4M Asie, menée entre janvier et avril 2018, est survenue en fin de programme.
La mission a pu observer quatre activités et notamment le forum organisé à Jakarta en avril en clôture à quatre années de collaboration. Elle a pu constater la promotion transversale des questions communautaires entre les différents groupes de bénéficiaires, bien que moins marquée sur le résultat 4 adressé à des médias de plus grande envergure, et conformément au premier objectif spécifique de "soutenir des journalistes et des organisations média dans la prise en compte des questions communautaires au niveau éditorial, pour les inciter à les intégrer à leur stratégie numérique".
Le second objectif spécifique visant à "soutenir les médias de la région dans leur transition numérique, notamment par l'acquisition de nouveaux outils, afin d'accroître leur lectorat et d'asseoir leur modèle économique" a été largement couvert par les formations dispensées en Indonésie, en Thaïlande, au Cambodge, aux Philippines et en Malaisie.
Pertinence du projet
4M Asie a constitué une valeur ajoutée dans l'environnement de l'aide aux médias en Asie du Sud-Est.Le retrait graduel des bailleurs a concentré les appuis à l'échelle nationale, sous-estimant l'effet levier de dynamiques régionales. 4M Asie a ainsi pu accéder à un lot de pays sous pression politique et économique tout en réintégrant des pays sortis du champ des bailleurs en raison d'indicateurs économiques positifs mais où persistent des inégalités locales très marquées.
4M Asie a réuni différentes familles de médias sous un programme. Le niveau d'adhésion et de partages entre professionnels témoigne des besoins élevés de croisements et d'échanges, imposés par les évolutions technologiques et attentes du public.
Efficacité
Le potentiel de mobilisation communautaire de 4M n'a pas été exploité à son maximum, notamment parce que le résultat 1 a agi comme point de rencontres plutôt que comme catalyseur. Néanmoins des liens, et même une alliance, ont été tissés ou consolidés au-delà du champ des activités grâce aux initiatives des responsables de projet de CFI, des participants et des experts fil rouge.
Les formations ont fourni une réponse à des besoins marqués, voire très marqués selon les bénéficiaires. Cette réponse s'est calquée sur la compréhension des enjeux globaux auxquels sont confrontés les médias plutôt que sur une compréhension des contextes et limitations propres à la région ou aux pays, limitant les perspectives de résonnance locale, d'appropriation et enfin de réplication.
La dispense des formations par des experts internationaux et français, loin d'être questionnée a été hautement valorisée par l'ensemble des bénéficiaires, pour le niveau d'expertise auquel ils donnent accès et la référence en matière de qualité. Cette attractivité et légitimité ont surtout opéré au niveau régional, de par la mixité des horizons et des langues. Le volet de formations mené en Indonésie par une seule experte française a signalé les limites de la traduction instantanée et limité le niveau de compréhension et d'absorption des savoirs.
Efficience
La gestion des dépenses s'est effectuée avec une priorité marquée pour la mobilisation d'un maximum de participants. La majorité des dépenses étant allouées aux frais associés aux déplacements, avec un effort notable pour contenir les honoraires d'experts dans des proportions raisonnables. Cette gestion efficiente des ressources, en cohérence avec l'objectif de mobilisation de 4M, est atténuée par la distribution entre résultats qui n'opère pas selon un principe de proportion entre la taille de l'échantillon de bénéficiaires et les perspectives d'impact ; ainsi le poste de dépenses le plus conséquent a bénéficié au résultat le plus éphémère (résultat 1).
La flexibilité institutionnelle de CFI a permis des recadrages et des ajouts qui auraient certainement été opérés avec plus de contraintes si 4M avait bénéficié de financements extérieurs. Cette flexibilité a permis de conférer à 4M Asie une stature différente de celle de départ dont les ambitions et perspectives d'impact étaient plus simples.
Impact et durabilité
Les ressources mobilisées sur l'Indonésie (temps alloué, proximité avec le partenaire local, taille de l'échantillon de bénéficiaires) ont permis d'illustrer les limites du renforcement de capacités s'il Ce mode opératoire soutient un modèle d'appropriation locale et des perspectives d'impact et de durabilité. n'est pas couplé à un travail ciblant les contraintes structurelles et institutionnelles au développement des médias, notamment le cadre légal régissant l'exercice de la profession.
Le
mode opératoire de CFI, caractérisé par l'absence de ressources humaines permanentes basées sur le terrain, au-delà du gain d'efficience, s'est révélé avoir favorisé l'implication et la responsabilisation des partenaires locaux et, dans une mesure moindre, celle des participants.
Sur la base des conclusions et recommandations de cette évaluation, CFI pourrait envisager la mise en place d'un nouveau projet sur le terrain en Asie du Sud-Est en 2019.
Déjà, le projet
Connexions rurales, lancé en septembre 2018, qui vise à développer l'information rurale au Cambodge, a tenu compte, dans son élaboration, de certains éléments de cette évaluation.