Mégaphone : un média alternatif libanais au cœur de la révolution de 2019
Projet associé
D-JilNé sur les réseaux sociaux, créé et porté par des jeunes, Mégaphone s’affiche comme un média indépendant et critique de toute structure de pouvoir.
Le projet Mégaphone voit le jour en 2017.
L’idée est de lancer un format innovant adapté aux réseaux sociaux et à la manière dont les jeunes consomment les médias, avec une ligne éditoriale intransigeante, critique des différentes structures du pouvoir. L’histoire de ce projet, c’est un peu l’histoire de tous les rebondissements politiques qu’on a vécus, dans le sens où le projet était parti dans une direction et il a évolué après
le 17 octobre. Le média s’adresse aux jeunes au regard de l’offre médiatique réduite qui leur est destinée. Mais il cible aussi des populations plus marginalisées qui ne s’informent pas sur les médias traditionnels, tels que les personnes réfugiées, les travailleuses et travailleurs migrants et les activistes de tous bords.
Comme le raconte l’un de ses fondateurs, Jean Kassir :
Au début, nous étions une dizaine de personnes qui se connaissaient depuis la fac. Nous faisions partie d’un collectif et c’est à travers le militantisme étudiant que l’on a commencé à s’impliquer politiquement. Nous avons pris part à toutes les étapes essentielles du mouvement de contestations au Liban depuis 2011, qui s’est poursuivi jusqu’en 2015 avec la crise des déchets et puis évidemment le soulèvement du 17 octobre 2019.
Avant 2019, Mégaphone avait déjà commencé à gagner en crédibilité auprès des milieux étudiants et activistes beyrouthins. Une grande partie de la population s’était mise à s’intéresser à la politique ; il y avait donc une demande pour ce genre de vidéos. Les bases étaient alors jetées pour être au rendez-vous du soulèvement du 17 octobre.
Le rôle de Mégaphone a pris une tout autre ampleur en devenant l’une des principales sources d’information lors du soulèvement. En plus d’une couverture quotidienne sur le terrain, ce média a joué un rôle de vigilance citoyenne en montrant les différentes manœuvres mises en place par les banques et le gouvernement. Il a en outre décortiqué des discours politiciens pour déconstruire la rhétorique officielle, notamment celle relative au système économique.
Dans le cadre du projet D-Jil – financé par l’Union européenne et mis en œuvre par CFI – consacré au renforcement des médias destinés à la jeunesse du monde arabe, plusieurs petites vidéos et un documentaire de 20 minutes ont été réalisés. Leur but : analyser les mécanismes du modèle économique de ces trente dernières années, responsable de l’effondrement actuel.`
Pour Jean Kassir, il a fallu du temps au Liban avant d’avoir sa propre révolution médiatique : Cela s’est fait tard, mais je peux dire qu’aujourd’hui on est sur une lancée où ces acteurs-là jouent un rôle primordial dans le paysage médiatique libanais. Comparé aux autres pays de la région, en 2011 il y avait surtout des blogs, puis, en 2015, la présence d’activistes sur les réseaux sociaux est devenue plus importante.
Mais c’est vraiment après 2019 que plusieurs plateformes d’informations alternatives ont vu le jour.
À travers les témoignages, les portraits de journalistes et les aventures humaines de notre série Aswat Jadida (Nouvelles voix, en arabe), découvrez dix années d’appui au développement des médias dans le monde arabe.