Aissata Sankara : "J’aime partager tout ce que j’ai appris avec les autres"
Rencontre avec Aissata Sankara, journaliste-reporter indépendante au Burkina Faso et formatrice pour Médiasahel et Médiasahel pour Elles depuis 2020.
Pourquoi vous êtes-vous intéressée à la formation ?
J’ai fait des études en littérature africaine d’expression anglaise. Mais, passionnée par le journalisme, je me suis donné tous les moyens pour y accéder. J’ai suivi des formations professionnalisantes de courte et moyenne durée, qui m’ont beaucoup apporté. J’ai donc décidé de partager ce que j’ai appris avec mes confrères et consœurs qui n’ont pas eu la chance d’intégrer une école de journalisme.
Comment avez-vous vécu votre première expérience de formatrice ?
Le stress était au rendez-vous ! C’était en 2017, je devais former douze journalistes à l’animation de débat télé. Je me demandais si j’allais y arriver et comment j’allais m’y prendre. La veille je suis allée préparer ma salle. J’ai essayé de connaître les différents profils de participants et participantes pour mieux me préparer et adapter le contenu.
Je me rappelle que l’introduction n’a pas été simple. Lorsque j’ai commencé par le portrait des stagiaires, j’ai senti de l’intérêt et de la bienveillance de leur part. Cela m’a aidée à surmonter mon stress.
Qu’appréciez-vous dans votre métier ?
Il y a des gens qui exercent comme journalistes depuis plusieurs années mais qui n’ont pas eu la chance de participer à une seule formation. J’aime partager tout ce que j’ai appris avec les autres. Ça fait tellement plaisir de lire de l’enthousiasme sur leurs visages ! Leur implication prouve qu’ils ont envie de s’améliorer.
Quel est le plus difficile dans ce métier ?
Le plus difficile, c’est lorsque des bénéficiaires ne montrent aucun intérêt pour ce que vous dispensez. Ils viennent parce qu’on les a désigné.es. Il arrive également que, lors des coachings in situ, nous ayons l’impression de troubler la quiétude du média. Parfois, en dépit de tout ce que nous leur avons apporté en formation, rien ne change dans le média. C’est difficile. On se demande alors si on sert à quelque chose.J’aime partager tout ce que j’ai appris avec les autres.
Quelles sont les thématiques de vos formations ?
J’aborde les fondamentaux du journalisme car c’est la base du métier. Nous devons revenir dessus à chaque session, car les équipes changent souvent dans les radios communautaires. On se retrouve presque tout le temps avec de nouvelles personnes. J’interviens aussi sur l’interactivité, l’animation des débat télé, la conduite des interviews et les émissions de concertation grand public.
Le journalisme sensible au genre et au conflit est également une thématique que j’aborde fréquemment.
Quel est votre souvenir le plus marquant en tant que formatrice ?
C’était à l’occasion de ma première formation Médiasahel sur les fondamentaux du journalisme, en 2020. Parmi les bénéficiaires, il y avait un animateur avec une vingtaine d’années d’expérience. Une carrière plus longue que la mienne ! Mais il n’avait jamais bénéficié de formation.
À la fin de l’atelier, il fallait produire un lancement en appliquant les techniques apprises. Pierre – c’est ainsi qu’il s’appelait – essaie un premier lancement, qu’il rate. Il ne désespère pas. Il tient à réussir avant de partir. Il recommence et séduit toute la salle par son contenu. Ses confrères et consœurs se lèvent et l’applaudissent. Les larmes aux yeux et la gorge nouée, il confie que, pour la première fois, il se sent journaliste. Ça m’a vraiment marquée.