saleh_cfi2023

3 questions à Nada El Saleh : "Parler et être la voix des autres"

Elle est le visage des vidéos pédagogiques de e-learning sur le reportage TV et les fondamentaux du journalisme, réalisées actuellement par l'Académie France Médias Monde, en partenariat avec CFI.
Propos recueillis par Emmanuel de Solère Stintzy.

 

Visage souriant, voix posée, gestes de la main précis, presque chirurgicaux pour guider son propos, Nada El Saleh, 36 ans, était en visite ce mois de décembre au siège de FMM. Rencontre avec une journaliste irakienne passionnée par son métier.

Quel regard portez-vous depuis votre enfance sur le journalisme en Irak ? Comment les médias de votre pays traitent-ils de la sécurité, du genre ou de l'environnement, thématiques centrales du projet Journalisme Innovant en Irak ?
Enfant, j'aimais déjà regarder les programmes à la télévision. Je ne pensais pas encore à devenir présentatrice, mais je voulais réaliser un métier qui laisse une trace. En faculté de journalisme, j'ai aimé préparer des émissions. J'ai senti que c'était ma place. Je pouvais parler et être la voix des autres.
La sécurité est le sujet principal dans nos médias, mais nous parlons assez peu de l'environnement sous l'angle du changement climatique comme nos confrères occidentaux. Ici en France, il est aussi souvent question des droits des personnes LGBTQI+ et de l'égalité femmes-hommes. En Irak, nous abordons plutôt les violences faites aux femmes et aux enfants.

Journaliste à Iraqi Media Network (IMN, télévision publique irakienne), vous êtes la présentatrice des 75 vidéos pédagogiques de e-learning en cours de réalisation pour vos confrères et les étudiant.es, en particulier ceux de la Faculté des médias de l'Université d'État de Bagdad. Que retenez-vous de cette expérience ?
Avec mes collègues (12 participants, dont 6 journalistes d'IMN et 6 enseignants de la Fac, Ndlr), j'ai participé à l'écriture des scripts et j'ai été choisie comme présentatrice. C'est une grande responsabilité : je dois résumer et incarner tout ce qui a été dit par mes collègues avant. Je me suis habituée à la caméra pour donner l'impression que tout allait bien, mais on voit tout de même sur certaines vidéos que je suis fatiguée ou un peu malade... J'avais par exemple parfois mal à la gorge, mais il m'est arrivé de parler 4 heures sans interruption ! Face à la caméra, j'oublie tout cela pour être efficace. Cette expérience me fait évoluer à un autre niveau. Aujourd'hui, je suis presque une nouvelle personne : mon cercle s'est élargi, ma manière de réfléchir aussi.
Après avoir regardé les vidéos, certains étudiants irakiens comprennent mieux comment transmettre les informations de façon claire et connaissent même par cœur le contenu des vidéos !
De son côté, Iraqi Media Network a besoin de regarder comment les chaînes internationales fonctionnent pour se développer et être davantage libre d'aborder certains sujets comme nous le voulons.

Comment voyez-vous l'avenir du métier de journaliste en Irak ? Et votre avenir dans cette profession ?
Dans quelques années, j'espère que les médias irakiens se seront développés. La télévision a évolué, mais nous espérons que les étudiants et étudiantes commenceront à réaliser d'autres productions, après avoir reçu des formations plus pratiques.
Quant à mon avenir, que ce soit à la télévision ou en radio, je serai toujours journaliste ! Ce métier est ma passion. J'aime réaliser un travail qui a un impact sur la société. Quand je partage mes idées avec le public, je me sens à ma place.

Image
saleh2_cfi2023