Soklim Ky

Soklim Ky, le journalisme tout terrain

Projet associé

Le fondateur du pure player Thmey Thmey a encadré une formation pour 80 jeunes journalistes citoyen·nes cambodgien·nes. Il partage sa vision du journalisme et ses secrets de longévité.
Portrait réalisé par Éléonore Sok.

 

Silhouette énergique et air malin de l’homme de terrain toujours à l’affût, le journaliste Soklim Ky est le fondateur et directeur du site d’informations générales cambodgien Thmey Thmey (Nouveau en khmer). En 2019, dans le cadre du projet Mekong info durable, il a supervisé la formation de 80 journalistes citoyennes et citoyens recrutés après un appel sur ses plateformes. Une initiation de deux jours mettant l’accent sur la déontologie.
Être journaliste c’est un métier, avec son cadre et ses règles, c’est important de fournir un bagage intellectuel avant tout, juge le professionnel de 49 ans, attablé dans le jardin au pied de ses bureaux, à Phnom Penh. Aujourd’hui, beaucoup de jeunes font des directs sur Facebook sans trop se questionner sur l'intérêt des sujets qu'ils couvrent, ou sans les analyser, et cela peut avoir des conséquences négatives, pointe-t-il.

Des débuts dans la presse francophone

Né à Takeo, au sud de la capitale, Soklim intègre en 1992 le département d'études francophones de l'Université Royale de Phnom Penh. Le français, il le connaît déjà un peu par imprégnation, à une époque où la langue de Molière est encore répandue dans le royaume. Cinq ans plus tard, le jeune diplômé se tourne vers le journalisme. J'étais un lecteur assidu de la presse locale, et je dois avouer que ça me passionnait plus que la littérature française, ironise-t-il.

Être journaliste c’est un métier.

En 1998, il rejoint Cambodge Soir, le dernier quotidien francophone du pays. C'est là où j'ai appris le métier ; comment trouver des sujets, des angles, une plume… Il n’y avait pas de style journalistique local à proprement parler, alors je me suis inspiré de la presse francophone et anglophone que j’ai adaptée pour la population cambodgienne, explique-t-il.
Après son départ de la rédaction en 2007, il est le correspondant de RFI, avant que n’émerge le désir de créer son propre média.

Avec Delux Leang, un autre vétéran reporter, ils ont l’idée d’un journal en ligne. Nous voulions changer le paysage médiatique : faire une presse moins protocolaire, moins polarisée politiquement, retrace-t-il. Après avoir convaincu investisseurs et sponsors, et obtenu une licence du gouvernement, ils fondent Thmey Thmey en 2012.
On a commencé chez moi, avec deux tables et deux chaises, se remémore Soklim. Aujourd'hui, la rédaction compte une quarantaine d’employés et une vingtaine de pigistes, en majorité de milieux ruraux et modestes. Le site publie entre 40 et 50 articles par jour, des formats courts ou plus fouillés d’informations générales, attirant 200 000 à 300 000 visiteurs uniques par jour.

 

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capture du site Thiemy

 

Une première collaboration avec CFI dédiée au monde rural

 

Nous voulions changer le paysage médiatique

En 2018, CFI soutient le lancement d’un nouveau site, Thmey Thmey 25, qui propose des formats vidéo de moins de 5 minutes sur l’agriculture, le tourisme, ou les produits d’identité cambodgiens, tels que le pain de sucre de Kampong Speu ou le poivre de Kampot.
Nous réalisons aussi des publireportages auprès de producteurs locaux dans lesquels on partage leurs coordonnées pour que les consommateurs puissent prendre contact avec eux directement. Cela valorise le secteur agricole et permet de lutter contre l'exode rural, détaille-t-il.
Avec 350 vidéos, totalisant 40 millions de vues, le site a rencontré un bel écho.

À l’assaut des réseaux sociaux

Prompt à innover, Soklim lance en 2019 une nouvelle section en anglais sur Thmey Thmey, Cambodianess, afin d’exister sur le marché international, et pour la diaspora cambodgienne à travers le monde. Selon lui, si les journaux papier sont en voie de disparition, il est d’autant plus nécessaire d’investir les réseaux sociaux. La majorité de nos lecteurs et lectrices provient de Facebook, sur lequel les gens s’informent désormais. Pour autant, je trouve qu’ils lisent plus qu’avant, pour beaucoup c’est une formidable porte ouverte sur la connaissance, salue-t-il, pas nostalgique.
Le patron de presse n’a pas perdu l’amour du terrain et s’offre parfois des escapades, par exemple pour réaliser des documentaires archéologiques dans les temples d’Angkor.

 

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Capture du site cambodianess