Ce qu’il faut retenir de l’impact du projet Échos des voix féminines
Un an après sa mise en œuvre, CFI publie sa première étude d’impact consacrée au projet Échos des voix féminines, un projet mené entre 2018 et 2022 au Maroc. Quels effets concrets pour les jeunes femmes du monde rural ? Leur place dans le débat public a-t-elle été renforcée ? Découvrez les résultats dans ce grand angle.
Une étude d’impact, pour quoi faire ?
Depuis plusieurs années, CFI mène des projets de développement médias ambitieux visant à lutter contre la désinformation, à promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes, à protéger l’environnement et à promouvoir la démocratie et l’engagement citoyen.
Mais jusqu’aujourd’hui, peu d’outils permettaient de réaliser un bilan sur les avancées constatées après les interventions de l’agence. Afin d’optimiser ses futurs projets, depuis 2022, CFI mandate des cabinets spécialisés pour réaliser des études d’impact post-projets. Pour le projet Échos des voix féminines, mené dans la région de Marrakech-Safi au Maroc, CFI a sélectionné la société Ingeterri Group, un cabinet implanté localement, avec une équipe composée d’un chef de mission docteur en anthropologie et enseignant à l’Université de Marrakech, d’une experte spécialiste en genre et inclusion sociale, et d’un chercheur en ingénierie et développement territorial. Les objectifs de cette démarche ? Assurer une transparence totale sur l'impact de l’action de CFI, et améliorer plus encore l’efficacité de ses projets au profit d’une information libre, inclusive et de qualité.
Échos des voix féminines, un projet dédié aux femmes du monde rural marocain
Cette première étude d’impact vise à évaluer la durabilité et les effets du projet Échos des voix féminines, financé par CFI sur fonds propres, un an après sa mise en œuvre.
Le projet se donnait pour ambition de renforcer la participation des jeunes femmes marocaines du monde rural au débat public dans la région de Marrakech-Safi. Pour cela, CFI a soutenu la production de contenus médiatiques innovants, produits par elles, pour elles et dans leurs langues, notamment en amazighe, grâce à un studio radio mobile qui a permis d’aller à la rencontre des femmes de ces zones rurales. Les émissions produites étaient diffusées par "Kech Radio", la radio numérique de l’Association Initiatives Citoyennes (AIC), bénéficiaire du projet.
L'étude d’impact a cherché à identifier les effets de la production de ces contenus sur les bénéficiaires direct·es et indirect·es, ainsi que les changements constatés en termes de participation des femmes au débat public et à la recherche de solutions pour améliorer leur égalité face aux droits.
Quatre catégories de bénéficiaires pour un seul projet
Si l’objectif du projet était avant tout de permettre la participation des jeunes femmes marocaines du monde rural au débat public dans la région de Marrakech-Safi, les bénéficiaires du projet ont en réalité été plus nombreux et nombreuses que cela.
Pour commencer, évoquons les effets obtenus pour les participantes au projet, qui en restent les principales bénéficiaires. Toutes ont pris conscience de leur capacité à agir et à analyser, à travers les échanges avec les équipes lors des ateliers de sensibilisation. Leur confiance envers les institutions a également été renforcée. Elles ont pu obtenir les informations nécessaires sur les procédures administratives, les attributions des élues et le fonctionnement des coopératives, les opportunités d'emploi ou de promotion de leurs produits, etc., mais aussi sur leurs droits et leurs devoirs. Grâce au projet, les femmes ont pu identifier des problématiques communes, échanger des informations, rechercher ensemble des solutions adaptées et changer leurs relations avec le monde extérieur en prenant des initiatives. Certaines femmes leaders ont également cru en leur pouvoir et se sont présentées aux élections locales.
La deuxième catégorie de bénéficiaires couvre un spectre plus large puisqu’il s’agit des femmes de la région de Marrakech-Safi, notamment des zones rurales. En effet, le projet leur a permis de bénéficier d’un soutien dans leur aspiration à une autonomie économique. Le projet a également permis d'identifier des processus de discrimination et de ségrégation derrière les témoignages recueillis, et a impulsé des initiatives de mise en réseau ainsi que d’échanges avec les autres radios associatives, les instances consultatives ou encore les élu·es.
La troisième catégorie de bénéficiaires est bien sûr l’Association initiatives citoyennes (AIC), qui a porté le projet via sa radio numérique Kech Radio, et l’ensemble de son équipe, salarié·es et bénévoles. Renforcement de sa ligne éditoriale, meilleur ancrage territorial, garantie de la soutenabilité des actions, amélioration de la compréhension des contextes locaux, mais aussi consolidation des personnels et de leur formation : suite au projet, l’AIC est définitivement installée.
Enfin, le projet a eu un fort impact direct sur la visibilité et la notoriété de Kech Radio, qui est devenu un modèle à dupliquer dans d'autres régions du pays, voire plus largement dans les autres pays d’Afrique du Nord, et sur la concrétisation d'une stratégie politique prenant davantage en compte les filles et les femmes des zones rurales.
Elles témoignent
Elles sont journalistes, chercheuses, militantes, présidente de coopérative ou encore élues et racontent comment le projet Échos des voix féminines a pu parfois, et même souvent, changé leur place au sein du débat public marocain.
Hafsa, militante associative et directrice du complexe social d’Amizmiz, souhaite créer une nouvelle radio. Le projet Échos des voix féminines a été l’occasion pour elle de se familiariser avec la radio associative, de côtoyer l’équipe de Kech Radio et de décider de développer une radio au sein du centre multiservices qu’elle supervise. En attendant, elle pense faire des reportages et des recueils de témoignages en utilisant la téléphonie mobile.
Saadia, forte de son expérience associative, a entamé sa carrière politique au sein de sa commune en tant que vice-présidente de la commune de Zawiya Ben Hamida dans la province d’Essaouira, tout comme Fouziya, élue au conseil communal. Cette dernière souhaite y jouer un rôle de premier plan dans la défense des droits des femmes et inciter d’autres jeunes filles de sa commune à s’engager politiquement.
Nadia a créé l’Association des femmes d’Ouled Selman pour avoir un cadre légal et intégrer les réseaux associatifs de la Province, mais aussi parler au nom des femmes et défendre leurs revendications auprès des structures publiques. Elle mobilise son association pour faire bénéficier les femmes des opportunités des ateliers, des rencontres et des cycles de formation développés par d’autres associations dans la région de Marrakech-Safi.
Nl, directrice du centre multiservices à Sidi Bou Othmane, a réussi, à travers son association, à tisser un partenariat avec L’Entraide nationale pour aider les jeunes filles rurales, victimes du décrochage scolaire, ainsi que les femmes en situation de vulnérabilité, notamment divorcées ou veuves. Le centre vise l’insertion économique de 74 femmes.
Rc a créé la coopérative de tapisserie dans la commune de Smimou. Elle y a consacré un espace pour accueillir des cours d’alphabétisation. En tant que membre de la commission locale de développement humain, Rc a plaidé pour la construction d’une crèche dans la coopérative. Le projet l’a convaincu d’y développer d’autres activités économiques, mais également d’y animer des séances de sensibilisation au profit des femmes.