Amadou Wangré, villageois et fier de l'être !
Amadou Wangré est le coordonnateur national de l'Association monde rural (AMR), basée au nord du Burkina Faso. Le village et ses valeurs guident depuis toujours ses actions.
Portrait réalisé par Emmanuel de Solère Stintzy.
Aujourd'hui, il travaille main dans la main avec autorités décentralisées et médias pour améliorer la gouvernance locale.
Mon papa était un grand paysan. Dans notre village (dans la région Centre-est du Burkina Faso, Ndlr), au moment de la récolte, toutes les personnes indigentes venaient se servir à la maison dans le mil du 'vieux'. Mon père me disait toujours que le travail n'a jamais tué personne. C'est le plus beau cadeau qu'il m'a laissé.
Depuis 2012 coordonnateur national de l'Association monde rural (AMR), Amadou Wangré aujourd'hui à l'aube de la cinquantaine, a été marqué à vie par cet héritage.
À l'école primaire, il était sage et travailleur, pas turbulent du tout ! Aujourd'hui encore, il travaille beaucoup, au point que je m'inquiète parfois pour sa santé ! témoigne Cécile Balima, une cousine de près de dix ans son aînée.
Il est infatigable ! Nous avons parfois du mal à suivre son rythme ! Les jeunes fraîchement sortis de l'université qui sont avec nous ressentent la pression, mais reçoivent en retour un bagage intellectuel appréciable, confirme David Worokuy, qui travaille depuis cinq ans avec Amadou à l'AMR.
Autodidacte exigeant dès son jeune âge, Amadou Wangré, alors instituteur, décroche son bac en candidat libre puis, en partie à distance, une maîtrise en sociologie, un master2 en sciences politiques et un diplôme d'études supérieures spécialisées (DESS) en développement local à l'Université de Ouagadougou : Les études m'ont permis de comprendre le comportement des citoyens et les actions à mener pour répondre à leurs besoins, après avoir posé un diagnostic.
Le développement ne peut pas être solitaire
En 1994, avec d'autres ressortissants de la région Centre-est, il crée l'Association monde rural, aujourd'hui basée à Gourcy (au nord du Burkina). Rapidement, avec le processus de décentralisation, la structure se spécialise dans la gouvernance locale, avec pour cibles prioritaires les jeunes et les femmes : Nous collaborons avec les médias pour notre visibilité, mais aussi pour que les gouvernants connaissent les problèmes locaux. Nous travaillons étroitement avec les services décentralisés de l'État, mais nous restons à l'écart de la politique politicienne.
Résultat : l'association compte désormais une quarantaine d'agents, près de 100 membres actifs et des centaines de bénéficiaires de ses interventions dans une cinquantaine de communes au Burkina.
Avec CFI, l'AMR travaille depuis 2018 dans le cadre du PAGOF (Projet d'appui aux gouvernements ouverts francophones) sur l'harmonisation des données budgétaires et la participation citoyenne. Avant ce projet, nous étions déjà dans les espaces de dialogue et d'interpellation communautaire sur la gestion du budget communal (Plan d'actions national 2017-2019, Ndlr). Le développement ne peut pas être solitaire, il faut une synergie d'énergies, mais aussi la transparence pour que les citoyens agissent pour le développement. Le PAGOF a augmenté notre visibilité et nous a permis d'étendre notre action à d'autres communes, se félicite Amadou Wangré.
De quoi renforcer encore l'enracinement du coordonnateur national de l'AMR, plus que jamais villageois et fier de l'être : Même si la ville est le centre des affaires, mon biotope, c'est le monde rural ! J'aimerais y développer la cohésion sociale et la participation citoyenne.
Dans 10 ans…
Avec son jeune cousin, Cécile Balima a appris à être prudente : Il surprend toujours ! Il ne manque pas d'initiatives et va toujours crescendo ! Dans dix ans, elle imagine donc Amadou Wangré impacter différentes communes du Burkina à travers l'Association monde rural (AMR) et ses formations.
L'intéressé précise : Nous sommes actuellement dans environ 50 communes. Dans un avenir proche, nous souhaitons couvrir les 351 communes du pays. À moyen terme, les ambitions de l'AMR sont même sous-régionales, car les problèmes des sociétés ouest-africaines sont à 90 % liés à des difficultés de gestion. À nous de façonner un nouveau modèle de gouvernance locale.
D'ici quatre ou cinq ans, Amadou Wangré veut soutenir une thèse sur ce même sujet pour capitaliser l'expérience accumulée et la soumettre à la critique intellectuelle. De nouvelles opportunités s'offriront alors peut-être à lui, mais l'actuel coordonnateur national de l'AMR promet qu'il continuera à "accompagner" sa structure de cœur.
Landry Wendsomdé Ouangré, son neveu, qui a travaillé avec lui à l'Association monde rural pendant trois ans, pronostique : Instituteur, puis enseignant dans le secondaire, mon oncle a toujours aimé partager son savoir. Après sa thèse, il sera sans doute dans l'enseignement supérieur et propulsera peut-être davantage les jeunes pour diriger l'association.